Alors que les habitantes et habitants de l’Aire métropolitaine de Port-au-Prince (Amp) et du département de l’Artibonite continuent de subir l’assaut de la fédération des gangs Viv Ansanm, le Conseil présidentiel de transition (Cpt, installé le jeudi 25 avril 2024) et le gouvernement de Garry Conille, installé le mercredi 12 juin 2024 s’enlisent dans la nonchalance. Au lieu de mettre en place un plan de sécurité efficace, axé sur les ressources locales, ils se lancent dans une campagne de propagande irresponsable depuis plusieurs mois. Faisant fi de la réalité catastrophique de la population, livrée en pâture à la violence au quotidien, ils multiplient les promesses et des mesures cosmétiques en matière de sécurité, qui n’ont jusqu’à aujourd’hui aucune prise sur la réalité du terrain.
Soulignons que le temps passé à faire ces promesses et à prendre ces mesures cosmétiques signifie, pour plusieurs millions de résidentes et résidents de l’Amp et de l’Artibonite, l’ajout des centaines, voire de milliers de nouvelles vies fauchées, de femmes violées, d’hommes et enfants assassinés, etc.
Au nombre de ces mesures, on peut citer, à titre d’exemple, la déclaration de l’état d’urgence touchant 14 communes, alors qu’aucun plan d’intervention des forces policières et militaires pour contrer les gangs n’a été conçu ni mis en œuvre. C’est en ce sens qu’au lieu de commencer à repousser les malfrats pendant l’état d’urgence et de reprendre sous son contrôle les régions que ces derniers occupaient, la police a concédé d’autres territoires à la fédération des gangs Viv Ansanm, comme l’illustrent récemment l’occupation et les massacres des membres de la population de Ganthier et Gressier. En clair, l’État et la force publique ne font que multiplier des communiqués dans les médias et réseaux sociaux, sans se préoccuper de la mise en place concrète d’une stratégie de lutte pour résoudre le problème du banditisme, en instituant par exemple le Conseil national de sécurité.
Par ailleurs, un autre événement marque les 100 jours du Conseil présidentiel de transition : l’accusation de corruption à l’égard de Louis Gérald Gilles, Emmanuel Vertilaire et Smith Augustin, trois membres du Conseil présidentiel de transition. Une accusation, portée par le président du Conseil de l’administration de la Banque nationale de crédit (BNC), Raoul Pierre-Louis, accusation qui n’a pas donné lieu, jusqu’à maintenant, à une sérieuse investigation par le gouvernement Conille, alors même que la lutte contre la corruption aurait dû constituer l’un des piliers de ce gouvernement de transition, comme le préconise l’Accord du 3 avril 2024.
De plus, ce qui est extrêmement grave, immédiatement après l’accusation, Raoul Pierre-Louis a été démis de ses fonctions en effet, l’accusateur a été révoqué, alors qu’aucune mesure n’a été prise pour mettre les présumés corrompus à la disposition de la justice. Le Cpt et le gouvernement refusent d’obtempérer aux revendications des organisations de la société civile, demandant le remplacement des présumés corrompus. Alors que des milliers de survivant.e.s sont contraint.e.s de fuir leurs milieux de vie, pour se réfugier dans des camps d’infortune, les gouvernants semblent prioriser la consolidation des pratiques de spoliation des ressources de l’État.
Il faut également souligner que ce climat d’insécurité larvée a des conséquences socio-économiques graves, dont une insécurité alimentaire grandissante pour une bonne partie de la population. Or, si le gouvernement ne fait qu’aborder le problème de l’insécurité à coups de communiqués et de mesures cosmétiques, rien n’est dit sur ces problèmes sociaux rampants. Au contraire, le pillage des maigres ressources de l’État continue, comme cela a été le cas dans le passé.
Fort de ces constats, nous, organisations haïtiennes de la diaspora, condamnons l’attitude irresponsable du Conseil présidentiel de transition (Cpt) et du gouvernement Conille dans le maintien du chaos social dans le pays.
Nous exigeons la mise en place d’un plan de sécurité efficace pouvant mettre fin au climat de terreur des gangs dans les différentes communes de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince et de l’Artibonite.
En lieu et place de la propagande et des déclarations creuses, nous demandons le retrait immédiat des présumés corrompus dans le Conseil présidentiel de transition, de manière à faciliter le bon déroulement de l’enquête sur le dossier de la Bnc.
De plus, il est essentiel que l’Accord du 3 avril 2024 soit non seulement officialisé et publié dans le journal officiel « Le Moniteur », mais également mis en application sans délai par le gouvernement de transition.
Enfin, nous saluons, avec consternation, la mémoire des milliers de citoyens, de citoyennes assassiné.e.s dans l’indifférence totale du gouvernement et du Conseil présidentiel de transition.
Nous appelons les classes populaires et les paysans, les paysannes à poursuivre la mobilisation pour la restauration de la sécurité dans le pays et l’élaboration d’un État de droit. Nous exhortons les forces progressistes, tant à l’intérieur du pays que dans la diaspora, à soutenir les justes revendications du peuple haïtien.
Chaque jour qui passe dans ce climat délétère constitue un véritable calvaire pour la population. Dans cette situation d’urgence, chaque minute compte. Le gouvernement de transition est responsable de mettre en application le plus tôt possible l’Accord du 3 avril 2024 et de tout faire pour prendre les mesures nécessaires et adéquates pour lutter contre le banditisme.
Pour la Coalition haïtienne au Canada contre la dictature en Haïti (Chccdh)
Jean-Claude Icart
Chantal Ismé
Richard Mathelier
Dominique Mathon
Walner Osna
Alain Saint-Victor
Pour l’Initiative citoyenne de New-York
Daniel Henrys
Daniel Huttinot
Julien Jumelle
Lionel Legros
Marie Michèle Montas
Pour le Comité en Solidarité avec le peuple Haïtien à Miami
Pierre Max Antoine
Hudes Desrameaux
Abel Simon Zéphir