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Poésie en français

Poème par Jean-Marie Plantin

Compulsion

Une présentation poétique du poète de son œuvre picturale

Compulsion par Jean-Marie-Plantin

Compulsion par Jean-Marie Plantin.

Les couleurs vives, les formes s’entrelacent,
Révélant une passion qui jamais ne se lasse.
Les traits s’entremêlent, se perdent et se trouvent,
Comme les tourbillons d’une danse qui nous émeut.

Des lignes sinueuses, des courbes sans fin,
Captivent nos regards, nous emmènent plus loin.
La toile respire une énergie dévorante,
Un tourbillon de sensations, une force galopante.

Des nuances ardentes, des teintes en fusion,
Symbolisant l’obsession et la pulsion.
Au cœur de ce tableau, des éclats de lumière,
Comme des éclairs brûlants dans l’atmosphère.

Ils illuminent les ombres, les rendent vivantes,
Et dans cette dualité, je suis hanté.
La texture rugueuse, les coups de pinceau frénétiques,
Suggèrent une lutte intérieure, un combat pathétique.

Les formes se déforment, se transforment en abîme,
Tandis que les couleurs crient, dans un silence ultime.
«Compulsion» est le reflet d’une quête insatiable,
Un besoin compulsif, une quête inébranlable.

J’explore les méandres de mon âme tourmentée,
Révélant les démons que je lutte à dompter.
Ce tableau saisissant, aux contours incertains,
Nous plonge dans une introspection sans fin.

Il nous pousse à réfléchir, à questionner nos vices,
Et à accepter les parts sombres de nos vies.
«Compulsion» est une œuvre qui interpelle,
Une fenêtre ouverte sur une réalité rebelle.

Elle nous rappelle que l’art est une catharsis,
Un moyen de transmettre nos tourments et nos envies.
Ce tableau m’accompagne dans mon cheminement,
il me pousse à explorer mon être profondément.
Car dans l’expression artistique, je trouverai la clé,
Pour me libérer des compulsions qui m’enchaînent .

—Jean-Marie Plantin

Poèmes de Jean-Dany Joachim

Erzulie

Je te salue vierge noire
Toi, grâce et bonté
Personne, ne m’a appris
À lire ton nom.

Ils ont brûlé ton effigie
Et offert la croix
À mes parents
Pour te renier.

Tu as suivi mes pas
Loin au-delà de nos eaux
Et ta main bienveillante
À veiller sur moi.

Je te salue vierge noire,
Que ton nom soit fêté
Toi, grâce et bonté
Je t’offre 1000 bouquets.

Sauvé

Faillir ne pas jouir
Cette douce joie
En ce jour spécial
Qui est à moi seul

Oh, ne pas entendre
Le son mélodieux
De ces mots qui s’offrent
Volontairement
Ne pas voir la page
Qui vite se remplit
Et l’encre qui coule
Au bout du stylo
Rater ce bonheur
Qui est toujours mien
Serait ma malchance
Voilà, c’est écrit !

—Jean Dany Joachim

Poèmes de Lenous Guillaume-Suprice

Entre entente et démolition

Il ne faut pas trop t’accorder avec l’ombre
que tu ne suis plus (pas à pas) désormais
et qui déchire ton portrait dans ses yeux
partout où elle passe sans état d’âme
volupté de fumée abrutie
avec ses coups de poignard
à jamais enfouis dans ton enfance-mémoire.

À côté d’un tas de regrets
l’adolescente que tu espérais devenir
devant sa porte sans aveu est postée
d’où elle refait les mêmes (a)dieux
d’une étape à l’autre
loin d’une emprise sur quoi que ce soit.

À l’entrée de son soubassement
au numéro 13 d’une maison à reconstruire
à la seule adresse du bonheur à l’envers
tu te tiens un peu aux aguets
sans distinction ni tranquillité
au milieu d’un vide sans échelle tout près
où des chiens laissent leur signature à pied levé
à la noirceur de ta félinité d’origine.

En attendant nul ne sait quoi au corps
avant de reprendre le roulis de l’heure
entre entente et démolition d’ailleurs
tu es en quête d’un peu d’espoir encore
pour à la nage retrouver ton âme d’antan
sur la grève du temps où sans répit elle t’attend.

(Montréal-Nord, mai 2022)

À visière tondue

« (...) Ils se retirèrent en attendant que les esprits retrouvent leur calme, mais ils ne revinrent jamais. »

(Gabriel G. Marquez, Chronique d’une mort annoncée.)

Ailleurs, le soir, sais-tu, certaines déesses se purifient, se parfument, se maquillent et font quoi encore pour honorer, à leurs dires, un sculpteur de la lenteur, un manieur de la douceur à ses mirobolants bois de charme.

Toi, tu fais partie de la chiourme, dans une galère qui dure et perdure, où des chercheuses d’anguilles ne cherchent plus à te tenir suffisamment loin de la boue projetée par leurs fouets du regard.

Toutes les heures, presque à tout mouvement, pire encore la nuit, une tortue de leur rancœur s’agite tout au fond de ton étang, piégeant ton lièvre de la sérénité, têtue comme des chiens en rut, portant fièrement les éclairs d’un orage des tropiques en cours de dévastation.

Pas une note de chaleur, pas un seul mot de leur part pour dénouer ta voix, au fond d’un chagrin de fjord, à l’effritement de ta marée au large d’un voilier de la vitalité.

Un bambin, dépourvu d’harmonie, au 21ème siège d’un théâtre d’ici, fait ses gammes sur un piano dans l’obscurité, en manque de ce qu’il faut pour rire, passant de la campagne à la ville, de là à une froideur en toi, veau déglingué, déchu de sa signification d’origine, à jamais déshérité de son alpage, sans vache en vue.

Tout près de quelques cornes d’aurochs, en silence devant les cahutes de tes nomades, au passage de certaines ombres qui ont formaté leur mémoire, il y aura toujours plus de verres brisés que de zestes de feux qui parfument tes forges en quelle que soit la saison de l’heure.

Une conteuse du désert, près de ton bivouac, tient mordicus à t’attacher à ses manières maintenant, pour la révélation, dit-elle sans même sourire, d’un amour de secret-punch-en-contenant jamais décapsulé.

Et toi, ne voulant plus avoir à négocier les courbes des mêmes dédales ni à être de retour dans les remous d’anciens mirages, tu toises sa main de tisane tendue aux lèvres de la tienne, de justesse esquives sa chaîne d’ancrage lancée contre ton port de tête, fuyant en allure d’éclairs les venins lieux de son hellène cadeau, les élans sans masque aucun de sa courtisane d’incitation.

(Montréal-Nord, printemps-été 2019)

Désaffection

Avec leur démagogie en bandoulière, par projets interposés, quelques hirondelles, à temps et à contretemps, ont failli squatter ta petite zone de tranquillité à contre-courant.

D’autres, par le détour, ont pu le faire en te vendant un porte-vent, alors que tu avais les yeux bandés
dans leur cul-de-sac.

À une réception bien particulière, tu as bel et bien vu plusieurs, dans l’indécence la plus sotte, autrefois, cracher leur trop-plein de soi au visage de convives sur place bien avant leur entrée attablés.

Et tu t’es retrouvé, malgré toi, à répertorier un grand nombre de flèches que tu n’as pas su, à regret, décocher contre leurs trains d’illusionnistes.

Maintenant qu’un certain branle-bas est derrière toi, qu’il n’y a plus d’embâcles à ton avant-poste de rachat, vers une ascension en toi-même de ce courant qui apprivoisera l’enfant blessé de tes élans, tu décides d’adopter une autre posture, dans ton regard, sur l’ensemble t’environnant.

Depuis, tu fais de la broderie avec le fil d’un plus ou moins abandon et la toile du temps.

En toute indifférence, tu laisses glisser des plumes sur ton eau en dormance, lorsque dans ton dos quelques clameurs, à l’occasion, cherchent à amadouer deux ou trois voies de sortie de leur indigence.

Mais si les effraies venaient à s’activer même en plein soleil, il faudrait réajuster les trébuchets du vent, mettre tout bas leurs mascarades, de gré ou de contraintes, et laisser monter la débandade de leurs ailes jusqu’aux branches les plus hautes des capitales de leurs éleveurs.

(Montréal-Nord, février 2020)

Lettre à Isabelle

Porteuse de mauvaises nouvelles, ta mer, en ce temps-là, se faisait toute douce à caresser les eaux d’autrui facilitant, à l’encontre d’un grand nombre de crédules, l’entrée en rade de tes désobligeants associés, les époux Caravelle et leurs scélérates triplées.

À bord de multiples archipels, entre des jalonnements de filous sous ton emprise par procuration, tu vivais sans âme de rapines, pleine de toi-même, parmi tout un tas de bruits de fortune, et des intérêts jamais restitués aux forçats que tu déshumanisais, le nerf de la guerre, bien doré, coincé entre tes mains louches d’entreprises et de vices.

(Montréal-Nord, déc. 2021)

—Lenous Guillaume-Suprice

Poème de Lamos Paul

Rêverie à Paris

Entre rêves et réalités dans une ville éternellement romantique, la muse se fait mondaine pour accueillir un épicurien vivant en multidimensionnel venant d’une planète étoilée. La ville toute entière se tourne vers elle quand tombée en pénurie de douceur, de tendresse, et de charme. La ville toute entière repose sur elle pour diriger ses invités vers les destinations les plus proches du paradis. La médaille platinum lui est décernée tant elle se soucie du bien-être des déshérités de la ville lumière.

Aux palais et aux musées on essaie de se mettre dans les pensées, l’esprit, et l’imagination des grands créateurs pour avoir une toute petite idée de leurs œuvres éternelles. Mais devant cette masterpiece aux béatitudes galiléennes, les admirateurs venant de partout se retrouvent seuls avec leurs cœurs et leurs pensées suspendus dans un questionnement permanent, mais sans réponse. Car l’esprit, les pensées, et l’imagination du Grand Créateur sont impénétrables à dessein. Alors il faut des prières, des incantations, et une purification spirituelle pour implorer le pardon du péché originel de tomber amoureux, espérant que le Grand Créateur se laissera lire les pensées et l’imagination pour bien comprendre cette œuvre exceptionnellement magnifique.

C’est alors qu’il parait très clair maintenant pourquoi les clochards qui ont raté le dernier train ne verront jamais Montmartre. Il paraît aussi clair maintenant pourquoi les princes venant de Katmandou ou de Casablanca ne verront jamais la princesse qui arborait une jolie robe noire pour la dernière soirée de gala avant la grande promenade royale. Les princes qui attendaient patiemment l’arrivée de la voiture royale se font piéger car la princesse a décidé de prendre le train, laissant ses chevalets dans la tourmente et la confusion la plus totale. Le roi, en convalescence, connaissant la témérité de sa fille unique, demande aux grands prélats de prier pour le trône qui est déjà sous la coupole de la princesse. Mais ces derniers, rongés par les rats du presbytère, se sentent menacés par la fougue, la jeunesse, la beauté, et l’insolence de la princesse.

Durant la grande promenade royale elle se laisse transportée par les reflets de la lumière jaunâtre à l’intérieur comme à l’extérieur des murs qui s’entrecroisent dans les rues pavées de briques rouges pour embellir un tableau qui dépassait déjà l’imagination des quelques artistes sélectionnés sur mesure. Devant les éclats de grands sourires et de fous rires en pleine rue, ces artistes, malgré sélectionnés sur mesure, sont tombés sous son grand charme et ont perdu leur verbe et leur inspiration.

En grand parolier des nuits blanches, j’ai traversé l’Atlantique dans les deux sens pour comprendre et déconstruire chaque couplet de cette mélodie originalement sublime que je fredonnerai jusqu’à la fin des temps. Et contrairement au conclave papal, la couleur et l’odeur de la fumée qui s’échappe après cette longue journée se vend aux enchères pour embaumer les élus bien vivant de la vielle république. Ces derniers deviennent donc plus radieux, plus épanouis, et surtout plus divins.

Quand des deux côtés de l’océan le cœur et la raison se complètent et se retrouvent au même endroit en même temps sans confrontation, les délices de tendresse et de divinité ne se font plus attendre. La traversée se fait donc en douceur avec un cœur bien léger en extase divine.

—Lamos Paul

Poème de Denizé Lauture

Le cri déchirant des Désespérés

De l’eau !
De l’eau !
De l’eau !
Nous avons besoin d’eau
Donnez-nous de l’eau !
De l’eau, s’il vous plaît !

Nous avons besoin d’eau
Pour sauver nos enfants
Pour étancher notre soif
Pour préparer notre nourriture
De l’eau !
De l’eau !
De l’eau, s’il vous plaît !

Nous avons besoin d’eau
Pour rester propres
Pour laver nos linges sales
Pour donner à boire à nos animaux
De l’eau !
De l’eau !
De l’eau, s’il vous plaît !

Nous avons besoin d’eau
Pour arroser nos terres
Pour avoir un jour des fleurs
Pour faire pousser nos plantes
De l’eau !
De l’eau !
De l’eau, s’il vous plaît !

Nous avons besoin d’eau
Nous sommes les agonisants assoiffés
Apportez-nous “L’eau de la vie” !
L’eau pure et claire de “la Rivière Sincère”
De l’eau ! De l’eau, s’il vous plaît !
Trois géants abattus !!!
Hier, trois arbres géants
Le firmament défiant
Maintenant trois trous béants
Exposant des racines pourrissant.
La hache des déments !

—Denizé Lauture © 2023

Poème de Jean Saint-Vil

Mon crayon qui ne paie de mine

Mine de rien
J’aime beaucoup mon crayon
Même s’il ne paie pas de mine
Ce crayon qui est toujours pour moi
Une mine d’inspiration
Chaque fois que j’écris
Avec la mine réjouie
Ce crayon qui souvent
Et même trop souvent
Tombe en panne de mine
Pour que je change de mine
Et me fait faire grise mine
Alors que je voulais absolument
Au départ gomme en main
Afficher bonne mine.
Ne comparez pas les amours
Ne comparez pas les amours
Ils n’ont jamais les mêmes couleurs
Ni au passé ni au présent
Ils n’ont jamais les mêmes odeurs
Dans le souffle du vent de leurs illusions
Ils n’ont jamais les mêmes saveurs
Dans les plongées de leurs ébats
Ils n’ont jamais les mêmes chaleurs
Au thermomètre de leurs étreintes
Ils n’ont jamais les mêmes profils
Dans leurs destins tracés d’avance
Ils n’ont jamais les mêmes échelles
Dans les folies de leur corps à corps
Ils n’ont jamais les mêmes pensées
Au fond de leurs cœurs pleins de brisures
Ils n’ont jamais les pieds sur terre
Même dans les îles du septième ciel.

L’eau de toute rivière

L’eau de toute rivière
Coule toujours en amour
Au fil de son voyage
En long et en travers
Jusqu’à son point final

L’eau de toute rivière
Chante dans son parcours
Des airs de joie candides
Pour faire danser les plantes
Qui sont au bord de son lit

L’eau de toute rivière
Change parfois d’humeur
Tantôt pour nous appeler du pied
Tantôt pour nous pousser
Vers une porte de sortie

L’eau de toute rivière
A toujours le ferme espoir
Que sa longue patience
L’amènera tôt ou tard
Jusqu’au bord de la mer.

À l’école des mots

À l’école des mots
C’est toujours la guerre
Entre les mots sérieux
Et les mots feignants
Qui trichent sans cesse

À l’école des mots
Les mots jouent des coudes
Pour être les premiers
Dans une course en tête
Dans les dictionnaires

À l’école des mots
C’est la foire d’empoigne
Entre les mots gentils
Et les mots méchants
Dont on se méfie
Pour leurs coups en traître

À l’école des mots
Les mots se donnent des coups
Et des crocs-en-jambe
Parce qu’ils veulent toujours
Être au bout des lèvres
De tous ceux qui parlent
Ou au bout des doigts
De ceux qui écrivent

À l’école des mots
Les mots sont des rois
Qui ont tous les droits
Sur les apprenants
Depuis le droit de vie
Jusqu’au droit de mort.

À la santé des mots

Je veux lever mon verre
À la santé des mots
Leur souhaiter longue vie
Comme les grands records
Que battent les séquoias
Sur leurs pattes d’éléphants
Je veux voir les mots dire
Qu’ils ne sont pas maudits
Sans être pour autant
De simples béni-oui-oui
Les mots viennent de très haut
Des entrailles des étoiles
D’où ils tiennent l’alchimie
De leur pérennité
Les mots sont toujours sages
Même ceux qu’on croit violents
Et quand ils sont malades
Ils se guérissent tout seuls
Comme par enchantement
Des maux qu’on croit mortels
Quand on fait leur bilan
On peut dire haut et fort
Qu’ils sont de vrais génies
À suivre pas à pas
Dans leur marche en douceur
Sur les bouts de nos lèvres.

Si tu t’appelles nuit

Si tu t’appelles nuit
Que minuit coupe en deux
Avec son double tranchant
Avant l’heure de l’aurore

Si tu t’appelles nuit
Sache que tu es très belle
Plus belle que le jour
Avec tes pleins pouvoirs
Sur les scènes d’amour

Si tu t’appelles nuit
Déploie toutes tes couleurs
Au vu au su de tous ceux qui t’attendent
En piaffant d’impatience infinie
Ce qui me plaît par-dessus tout
C’est qu’elles changent de teinte
Toutes les heures qui sonnent
Tantôt bleue
Tantôt grise
Tantôt noire
Que sais-je encore
À la seule exception
Que je n’aime pas les nuits blanches
Qui sont signe d’insomnie.

Bonjour merci et au revoir

On doit dire bonjour
Avant toute autre chose
À son premier contact
Du jour qui vient de s’ouvrir
Sourire du soleil en prime

On peut dire merci
Même la nuit venue
Histoire de témoigner
Sa vive reconnaissance
Au jour qui vient de partir

On doit dire au revoir
À tous ceux qui s’en vont
Même au lit de la mort
Sans qu’on ait une idée
Du jour de leur revoir.

—Jean Saint-Vil

Poème de Vilvalex Calice

Bang ! Angela ne se relève pas

C’est le plus beau ciel vermeil,
Que la nature n’ait jamais octroyé à notre peuple.
Peut-être que nous n’avons pas eu la force
De regarder là-haut ces derniers temps,
Ces lueurs cramoisies qui tachent l’horizon.

Il pleut du rouge sur tout le quartier,
Et cela à distance inouïe, à perte de vue,
Des toits, des terrains vagues, vacants,
Illuminant ainsi des maisons délabrées,
Bâtiments abandonnés, voitures déglinguées.
Le triste décor habituel est soudain réanimé
Par les réverbérations du ciel aux mille éclats.

La pauvreté et les ténèbres sont en fuite.
Le sourire triomphant du soleil radieux
Éclipse les mines fâcheuses du quotidien.
Des rires et ricanes sont partout. Les enfants s’amusent.
Les parents se fraternisent de par les clôtures,
Tout en surveillant de près leurs enfants qui jouent.

La décence et la joie semblent, encore une fois,
Trouver le droit chemin jusqu’à nous.
Tous ceux qui disent que les fleurs ne poussent pas sur le béton
Doivent venir visiter le toit
De notre immeuble à la Première Avenue,
Où les fleurs étalent leurs doux parfums
De façon équivoque sur l’air que nous respirons,
Bravant les manigances meurtrières de la misère.

Ici, aujourd’hui nous avons trouvé
Quelque chose de grand, indescriptible presque,
Que des barreaux sordides ne peuvent emprisonner :
Le joyeux bruit du rire de nos enfants.
Aucun complexe d’infériorité n’est capable de forcer
L’acceptation institutionnelle de l’abject désespoir,
Pour infirmer la jeunesse et pâlir le zeste pour la liberté.

L’amour de la vie est l’antécédent, le prélude
Pour instiller l’espoir dans l’esprit habile des enfants.
La jungle urbaine est pleine de vie.
Les papillons monarques de la banlieue
Semblent avoir raté leur virage,
Maintenant poursuivis par des enfants de six ans.

Rire rebondissant contre les balançoires,
Toboggans, cerceaux, vélos et autres choses.
Mais, là où nous vivons,
La sécurité observe un strict couvre-feu
Lorsqu’une couche étanche d’obscurité se précipite
Pour dévorer la lumière du jour qui se dissout
Afin de cacher les visages des criminels,
Trafiquants de drogue dans les coins de rue.

À 19h00 pile, l’Angélus sonne
Pour annoncer la tombée de la nuit.
Les balles habillées de leurs vestes en métal
Chantent en chœur dans une cacophonie sciante.
Lorsque les revolvers violent les règles de la vie communale,
Nos anges sont entraînés à se jeter par terre.

Soudain, Bang ! Bang ! Bang !
Tout le monde se jette sur le sol,
Puis se lève pour courir à la maison
En tant que vrai soldat, survivant du ghetto.
Mais Angela ne se relève pas.
Angela ! Ne se relèvera jamais.
En ce monde qui devient lascivement sourd
Aux hurlements stridents de nos âmes meurtries
Par le vernaculaire du fusil et l’onomatopée de la mort :
Bang !

La part du lion et les miettes

Quelques maigres que soient les recettes,
Le lion dévorera sa part entière, nette.
Voyons ! Le partage n’est pas de sa nature,
Nous le savons tous, malgré nos murmures.
Mais autant que cela nous déplaise,
Le lion continue de bouffer à son aise.

Certains tentent de raisonner, de négocier avec le lion,
Souvent, la part du lion lui est octroyée par le démon.
Ils disent :

« Ne nous laissons pas mourir de soif et de faim.
Roi, trouvez dans votre cœur, pour éviter cette fin,
Quelques élans d’altruisme digne d’un grand roi.
Espérons que nos malheurs ne vous laissent si froid. »

« Avant de répondre, je vais vous en dire une chose :
Bassesses et flatteries n’avanceront pas votre cause.

Je suis roi, j’exige qu’on obéisse, qu’on tremble devant moi.
Ça n’ira pas. Mes désirs et caprices sont pour vous des lois.
Sachez-le. Ne me demandez pas d’agir contre ma nature,
Je vous laisse abondamment de miettes comme nourriture.
Humbles servants, si vous avez bien géré ce que vous aviez,
Vous seriez tous, aujourd’hui, un peuple heureux, rassasié,
Docile, sans vouloir s’accaparer de la part du lion ou du loup,
Vous ne vous trouveriez jamais fustiger dans ces courroux. »

Le silence pèse très lourd sur les consciences vierges,
Quand la peur, l’insouciance et la mort nous assiègent.
Quoi faire ? Devons-nous nous courber et nous taire ?
Ou les rappeler qui sont les vrais maîtres de cette terre ?

Beaucoup proposent d’augmenter les recettes.
Ils pensent que plus que le roi a dans son assiette,
Plus qu’il y aura de miettes pour tous les autres,
Selon la logique défaillante de quelques apôtres.

Pour eux, c’est la brutalité qui fait la valeur de l’être.
Ils sont prêts à servir des brutes comme maîtres,
En essayant de sévir dans leurs bonnes grâces,
D’accepter de gémir, même mourir dans la crasse.

Ils sont à bout d’idées, de visions, d’efforts et d’espoir.
Honte de vivre ainsi, anxieux de se voir dans le miroir
De la vie, prêt à se briser entre les mains des truands
Qui tuent pour des miettes et baignent dans le sang.

On dit :

« La raison du plus fort est toujours la meilleure. »
Est-ce parce que l’on crève de peur et de frayeur ?

L’histoire du monde est bourrée, dans ses marges et alinéas,
De victoires contre les rois des plus forts, tombés en désarroi.

Avant la révolte, on ne doit jamais se déclarer vaincus,
Selon le passé, l’histoire et même des défaites vécues.

Car il prendra du temps aux lions de se forger une conscience.
Dans l’intérim, mettons fin à la souffrance et sa redondance.”

La tyrannie du temps

Je cache mes beaux souvenirs
Dans le silence du vent
À l’abri du temps
Qui fait la sourde oreille
À mes angoisses ;
Ce temps qui filoute l’existence
Par des minutes sournoises
Et des heures de malheur.

Le temps vole au grand jour
Nos rires et sourires,
Affiche sur nos tempes d’abord
L’empreinte de ses pas
Ensuite sur notre peau,
Et même dans notre esprit,
La vie, parfois, s’achève
Tout bêtement
Comme une chèvre
Au milieu des rêves vierges,
Inquiets ou inachevés.

Mais souvent on oublie
Que l’avenir n’a pas de souvenir
Parce qu’il est toujours à venir
Et n’arrive jamais à l’heure
Pour épargner le cœur
Les ravages du temps.

(Géorgie, États-Unis)

—Vilvalex Calice

Poème de Charlot Lucien

Le relent de la guerre

J’ai voulu exalter le feu,
Le feu qui éclate en geysers triomphants,
En formidables globes
D’écarlate, d’orange et de jaune,
Et surmontés de magnifiques panaches
Grisâtres et blanchâtres
S’élevant dans les cieux nocturnes.

J’ai voulu exalter
Le grondement sourd et puissant
Des canons qui crachent la mort
Et les voix rauques et martiales
Aux échos multipliés dans la plaine
Qui rugissent leurs ordres
Aux rangs infinis d’uniformes
Enfilés sur des ombres zombifiées
Pour et par Raison d’État.

C’était beau la guerre.
C’était avant que je ne hume
Le relent de sueur et de peur et d’urine
Émanant de magnifiques soldats
Sur le point de tuer
Sachant qu’ils allaient mourir eux aussi.

C’était avant que je ne hume
L’émanation morbide
Des malheureux en uniformes
Qui puaient déjà le cadavre
Parce qu’ils se savaient déjà cadavres.

—Charlot Lucien

Poèmes de Mesmin Charles

Jacmel

Le champ aqua-marin attise nos pensées
dans ce vide de soufre de juillet
en pourpre
Étreint à vol d’oiseau à perche de Morne Laporte
le tapis affaissé de la pleine azurée
L’image têtue d’une enfance captive
s’impose d’airain à une vue troublée
tendue
fétiche d’un passé déjà vieux
La baie à nue dans ce folklore de couleurs
comme une cône à la charpente des rives
faufile langoureusement ce voile bleu-marin
au châssis du cap des Maréchaux
Jacmel ville historique sous la foulée des âges
tes guirlandes d’acacia sillonnent
nos rêves à huit-clos
La panache déchue de tes altiers cocotiers
augure le sort de tes rues en lambeaux
et les cris lointains abasourdis de tes poètes
cinglent nos cœurs
en émoi.
Sanglots
Seul et serein
dans ma lourde agonie
les pupilles flottant
aux rives des sanglots
je t’appelle, ô mère,
berceuse de mes maux
crispé comme enchainé
dans l’abîme fatal
un amer désespoir
aux hantes rapaces
s’abat pour engloutir
mes cris sans échos
de l’amour s’il en est
le mien c’est l’enfer.

Ô Afrique

Ô Afrique mère, matrice de l’humanité
Tu as engendré des royautés
Des civilisations de notoriété légendaire
De toi naissent des nations, peuples millénaires
Tu as cousu le monde du fil précieux de ton héritage
Dans les cloisons de l’histoire cachent tes vérités hallucinantes
Le moderne a rompu la marque de ta présence
Suffocant l’étincelle de ton art
Qui ne cesse de jaillir dans les coulisses des ans
Tu tiens ancrée dans les eaux de ta culture
L’essence de la journée humaine à travers des âges solaires
Revêtant l’empreinte indélébile de l’Être
Sur la face exaltante de l’humanité
Ô Afrique, genèse de la vie
Glane sur nos pas la lumière de ta vérité
Exaltante gloire de l’homme.

Une passerelle traverse la Chute Montmorency, au nord-est de la ville de Québec, dans le parc éponyme

Une passerelle traverse la Chute Montmorency, au nord-est de la ville de Québec, dans le parc éponyme. —image par le photographe à Paris David Henry

Chant marin

Je suis le flux et le reflux des vagues
Je viens je vais je monte et je descends
sur le tapis du cosmos
Tantôt calme tantôt furieux
sûr je pose ma tête sur la couche du sol
Je gronde ma colère dans le vent qui me tient
C’est le constant refrain de la vie
que je chante
le murmure de la terre
dans le temps et l’espace
qui abritent nos êtres
à son rythme
attelés.

Perfidie

Et dans l’étanche profondeur des mers caribéennes
S’éteignent les rêves mille fois bafoués
Des jeunes soleils du pays
Asphyxiés dans des orgies politiques
Truffées de viols et de meurtres
Haïti ne souffle plus
Elle meurt d’une mort lente, sadique
Sous les griffes perfides de l’aigle furtif
Et dans le cruel tohubohu du temps si funeste
Git le rêve sacré de nos ancêtres
Consumé
Malheur de tout un peuple à l’affût
D’un avenir gâché
Y aura-t-il encore un brin d’aurore
À l’horizon ténèbres ?

—Mesmin Charles

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