Le bon patriote fait encore vision à une Haïti chérie, « Perle des Antilles ». La jeunesse déçue, voulant suivre les pas de leurs ancêtres tentent, de temps en temps, une lutte colossale pour une Haïti, un lendemain meilleur. Mais… à chacun sa façon de voir, de penser, d’idéaliser ce grand et fou rêve. Donc, voyons-nous, des intellectuels, des âmes de bonne volonté, de rudes travailleurs, assez souvent des déviants, qui se soulèvent avec ferme conviction de mettre mains à la pâte. Retrouvons-nous dans ce rassemblement des têtes calées en tout pour ce combat qui ne promet pas un dénouement heureux.
Les même histoires se répètent, nous ne voyons pas de nouveaux faits. Les mêmes qui crient « viv », protestent avec force « aba ». Un président s’en va, un autre arrive. Nous changeons de Ministres, de Directeurs, d’employés autant que change de culotte une femme méticuleuse. En écoutant la radio, quand une personne supposée bien formée parle, nous avons la mauvaise sensation de revenir à l’époque « Des Précieuses Ridicules ». Que des jeux de mots ! Rien que des cerveaux emprisonnés par un explosif constitué de pâte malléable invisible. Encore des jeux de mots ! Nous parlons de changement sans savoir vraiment sa signification. Nous ne faisons que nous plaindre sans réellement chercher la source de nos malheurs.
Tous ces esprits bien meublés, tous ces connaisseurs en matière de loi, en politique, en finance, en économie, tous ces hommes de rue, tous ces artisans, paysans, ingénieur, techniciens en tout, tous ces artistes qui se réunissent tout ce temps et n’arrivent encore à ramener cet espace géographique à un quart même du niveau qu’il était. Quoi d’étonnant ? La prétendue collectivité humaine qui y habite espère toute un titre de propriété de cette mère patrie. Hélas !
Des jeunes gens éduqués, des étudiants soucieusement formés, des normaliens de renom, Des médecins prouvés, des poids lourds pour l’avancement et le bien être de notre société, nos têtes calées, nous en avions beaucoup, nous en avons en nombres… Où sont-ils passés ? Que font-ils ? D’autres terres les attirent ! L’amour du pays, la dernière chose dans leurs esprits. La patrie ne leur accorde aucune chance. Ils plient bagages, sautent dans de petits bateaux, dans des bateaux, des avions, des voitures et à pieds pour s’éloigner le plus que possible de leur « chez soi » peu prometteur. Beaucoup voyagent illégalement, d’autres se sont mariés pour avoir une résidence dans un pays étranger. En quantité ils renoncent à leur nationalité haïtienne pour mieux survivre ailleurs. Pouvons-nous les blâmer?
Cette catégorie-là qui paient nos loyers. À eux seuls, ils nourrissent plus que la moitié de ceux qui restent. Grâce à eux, nous pouvons fréquenter des écoles professionnelles, des facultés, nous pouvons nous habiller avec élégance. Ces hommes qui travaillent dans d’autres patries nous permettent de survivre. Pour faire chercher un parent ils se sacrifient. Ces Haïtiens font l’impossible pour retirer leur famille de la misère. Certains pensent revenir développer chez eux. D’autres y pensent et beaucoup jurent de ne jamais songer à cet endroit de malheur. Ils en ont assez. Ces compatriotes ne veulent plus voir nos saletés, ces victimes de notre manque de tactique ne souhaitent plus respirer l’odeur des caoutchoucs, de la chaire de nos frères et sœurs brûlant dans les rues. Nos génies ne désirent plus voir les vitres de voitures cassées. À jamais nous les avons perdus.
Chez nous, des têtes calées, beaucoup sont sur place. Ils étudient encore, font travailler leurs méninges pour savoir comment débloquer Haïti. Ce sont des hommes et des femmes consciencieuses, avec de bonnes intentions et qui résistent encore à la tentation de partir. Chacun pose son bloc en essayant de suivre les mêmes règles pour un même but. La plupart agissent patiemment, d’autres plus agressifs. Une partie préfère travailler dans l’ombre ; question de tempérament ou de sécurité. Ces combattants pour le développement de la patrie sont souvent des hommes politiques, ou de simples cultivateurs, des ouvriers, des cordonniers mais à leur manière, et sûrement une pierre est placée pour la progression. Une jeune écolière plante un petit arbre pour combattre l’érosion. Nos têtes pensantes avec ardeur mènent la bataille pour la reconstruction. Ces disciplinés savent, croient et s’attendent que chaque action positive vienne avec un résultat positive. Ils se démêlent parmi la foule pour faire la différence du mieux qu’ils peuvent. Ces personnes calées en chimie, mathématique, physique etc., cherchent des formules appropriées pour résoudre nos problèmes. Existe-t-elle, de telle formule ? Il y a-t-il des solutions pour nos problèmes ?
Faut-il bien que tous ensemble, nous les inventons ces formules, ces solutions. Arrêtons-nous donc un instant à chercher des formules et solutions tout faites car notre cas est unique, notre liste de présidents est trop longue, nous avons plus de bouches que de nourriture et la base de notre construction est en argile. Terrible ! Ouvrons nos yeux, ne soyons pas des statiques d’idée, de pensé. Restons des avisés.
Une tête calée, un homme dangereux pour notre environnement tant que celui-ci est mal encadré. Nos personnages intellectuels, notamment nos jeunes, ne savent que faire de leur savoir. Pas moyens d’expérimenter, pas moyen de travailler, pas d’avenir sûr. Aucune occasion ne se présente pour eux, ils n’ont pas accès au pire : un voyage illégal. Une partie s’autodétruit : beaucoup sont consumés par la drogue, l’alcool, deviennent des fous. Ici, il y a une tête calée qui préfère rester honnête et qui essaie de profiter d’une opportunité. Ils sont très rares. À côté une tête calée manigance un coup. Certainement un banquier est sur le point d’être kidnappé, cet employé de l’État s’est fait voler son salaire aux environs de la banque.
Pire encore ! Une tête calée, souvent est chef de file. Meneur de troupe. Un homme d’affaires, un politicien corrompu un grand malfaiteur, on l’offre une grosse somme d’argent, il est capable de n’importe quoi. Avec son esprit calé en manipulation, un peuple peut être soulevé ou endormi. Combien de vendeurs de drogue sont-ils en prison ? Comptons les grands voleurs qui se font prendre, il y en a pas beaucoup. Les grands planificateurs de crimes sont pris en flagrant délits rarement. Normal ! Quelqu’un de peu d’intelligence n’est pas capable de préparer ces coups. Il faut une tête calée pour des affaires calées.
Haïti, une vie calée. Nous sommes étouffés ! Nous brassons longtemps et n’aboutissons pas à une vie meilleure. Les experts en destruction cassent, brisent, volent, brûlent et tuent dans les rues, les gens qui manifestent calmement, les habitants qui se démêlent pour vivre et faire vivre leur famille sont aspergés d’une eau qui fait gratter. La population qui reste dans leur coin est bombardée par du gaz. L’enfer est monté sur le sol haïtien. Le mal est partout. Nous avons peur de marcher. Nous craignons les rues. Nous nous méfions de nos semblables. Nous évitons naturel et surnaturel. Plus rien n’est respecté. N’avons-nous pas entendu parler de l’histoire d’un jeune qui ouvra une bouteille dans une salle de classe, que d’un coup tous les élèves étaient possédés ? La police a fait quoi de cette histoire ? Saurions-nous nier l’affaire d’une jeune fille qui nourrissait une couleuvre qu’elle prétendait être son mari. Incroyable ! Passerons-nous tout notre temps à enterrer nos parents, nos amis assassinés pour rien ? Nous voulons un emploi. Nous voulons la sécurité. Nos problèmes sont calés… Pourquoi toutes les têtes calées d’Haïti ne se mettent-elles pas ensemble pour apporter une solution calée.