Poèmes de Bobby Paul
Dans le car
quand j’ai vu le car
en marge de ton écriture
j’ai au tréfonds de ma tête
la traduction d’une voiture rose
sans trop d’effort
ombres en symbiose
nous sommes déjà à bord
assis auprès de toi
dans les bras d’un silence de mort
qui nous pousse, nous pousse
beaucoup plus près l’un de l’autre
sans conduire, sans nul effort
nous sommes déjà parmi les étoiles
tout ne nous dit plus rien
puisque nous sommes
l’un pour l’autre le seul bien
toutefois je me demande
durant le dialogue du voyage
de nos deux corps en feu
si ce n’est pas le langage
de ton souffle haletant
que je comprenne le mieux?
Chant de pierres
l’arbre
avait tant de choses
tant de choses à dire
il a vu tant de roses
tant de roses sourire
une couronne
pour trois personnes
et tout le bonheur
au cœur de la fleur
l’arbre
avait tant de choses
tant de choses à dire
il a vu toutes les roses
toutes les roses mourir
Tatoueur de mots
au miroir de l’eau bleue
elles sont fanées les roses
des squelettes de mots
sont écrits sur les arbres
anonyme épitaphe d’amour
chaque message a son mystère
le mariage de la flèche au cœur
jamais ne traduit le dernier baiser
pourquoi ne pas essuyer
les yeux des fenêtres
elles ont tant pleuré
tant pleuré le quotidien
et le mutisme des murs
la ville orpheline calmement s’endort
les maux se reposent au cimetière
où des noms et des chiffres tatoués
font le pont entre le rêve et le réel
La blessure
je vais tous effacer
mes je t’aime écrits partout
sur les murs de la ville
ton nom
une larme
ta voix
une douleur
mon cœur
la béante blessure
sculpture de marbre rose
souris, souris, souris sans fin
ils pleurent mes derniers mots
Réincarnation
titanic
se noient
les sabots
de Basquiat
le blues murmure
qu’il faut contre soi
descendre la pente
alors
je descends
descends
descends
vaguement
vers l’abime
tant d’autres en moi
ont déjà fait le plongeon libre
ils ont su refaire surface
saurai-je mon dieu
une fois pour toutes
comment retourner
vers l’autre moi-même?
L’oration des mots
ce ne sont plus
de larmes bleues des étoiles
que l’heure tardive remplisse
les luisantes carafes en cristal
ce ne sont plus
les lamentations de la lune
qu’auditionne le vieux temps
au purgatoire de l’espace
la tombe a pour devoir
de dissimuler toujours
l’indolence de l’éternité
ô douce et tendre volupté
en abondance répand
la bienveillance de l’eau,
des arbres, des fleurs,
de la pluie, et du soleil
dans l’air parfumé de jasmin
enfin
qu’ils restent tous en harmonie
pour guider merveilleusement
les pas du rêve des mots dans le vent
Séparation
quand
ils avaient
plus rien
absolument
plus rien à se dire
statues de chair
épures de fer
toutes sensations mortes
mains déboussolées
aux détours de l’angoisse
ils déchirent les souvenirs
et puis
détresse affichée
au visage du trottoir
d’un trait tout devient
Détermination
enfant d’or
il nage libre
dans le napalm
pour aller longuement
embrasser le soleil
on a vu
tout ça mon dieu
tout ça on a vu
dans les yeux de la liberté
champignon de fumée
frappant fort aux portes du bleu
des millions de voix disparues
des millions de cris étouffés
aux entrailles du chaos
toutes les nuances de la vie confondues
on a entendu tout ça
tout ça ma foi
on en a déjà entendu
dans les soupirs de la liberté
alors
qu’est-ce qu’il y a de plus
à voir ou à entendre encore
dans la détermination
des blessures des rêves?
(2008)
—Bobby Paul
Poèmes de Mesmin Charles
Moi
Je suis ces paysages bruts
aux parfums éternels
ces nuits profondes
plantées d’étoiles
à la chasse des jours
je suis nègre petit-fils-paysan
nature chant de coq
je porte la langueur
des âmes de nos ancêtres
étandard
à l’auspice de ma vie.
Horizon
Et cette terre intense de vie africaine
languit sous une buée
effarée d’histoire
son horizon de peuple lacéré
de maux
esquissé brusquement aux tranchées de la liberté
âprement
se ternit
dans les sentiers des temps.
Face
Visage de plomb
fantasme de mes rêves
engourdissant les heures languissantes des jours
au cœur de l’agonie
face éthérée halée de maux et de misère
ange d’une caraïbe meurtrie
où crève l’espoir
les amas de tes années bénignes pèsent
pèsent
aussi lourd qu’une vieillesse rassise de vie
au creu d’un néant fatal tu cherches ton lendemain
les plis de la nature aux jalons de ta jeunesse hantée
croupie au seuil de l’espoir
raidissent l’innocence de tes yeux
tu es l’écho
d’un monde aux appâts égoïstes
les heurts des copains du cosmos
fracassent chancellent
sous le bruit de tes pas
incertains.
Caresses du tam-tam
Nuit étoilée
à la saveur des boucans
mugissement sacré de l’assotor
augure de la ronde
mystérieuse des loas
les frêles bras du vèvè
rassemblent tous les fils
sous les rameaux protecteurs
du mapou des aïeux
la vague spirituelle
des cadences rituelles
encensées de rythmes exaltants
déchire l’espace
ahuri de secrets
et de plaintes montées
et la voix exorcisante
du tam-tam
sous les rudes caresses
de phalanges adeptes
brisant le silence atténué de la nuit
comme la conque salvatrice
du marron merveilleux
pleure
clame
unité
Haïti liberté
—Mesmin Charles Sélection parue dans Et le pétale pleure
Poèmes de Mario Malivert
Mon pays dévalisé
Mes rêves à la débandade,
Sur les trottoirs en flammes
De Port-au-Prince.
Ma ville rouge et en feu,
Les chars de bois et de fer
Déambulent
Dans les rues jonchées de pneus,
Les soldats en kaki et en vert olive,
Camouflage et mascarade.
La danse insolite des démagogues,
Les doigts dans le coffre-fort,
L’or de la ville dans la poche.
Ils rêvent de chalet à Montagne Noire.
Leurs têtes sans corps
Circulent dans les boites vitrées,
Carrousel dans les rues poussiéreuses
De la ville.
Ils détestent les plaintes
Des mains vides de La Saline,
Des marécages de Cité Soleil,
Des ventres creux de Jean Rabel.
Ils détruisent le pays qu’ils appellent chéri.
La lumière promise
Les pans de l’esprit s’essoufflent à trouver
L’Eden perdu à l’aurore des âges.
Face au silence des cieux, l’homme s’invente des dieux.
Il poursuit la corde argentée qui se noue aux astres.
Il noie le doute qui gît aux confins de l’âme
Dans la providence espérée des créatures d’argile.
Au temps fixé Dieu érige Israël,
Son joyau aux tréfonds du tumulte des nations.
Sa loi affermit la démarche de son peuple.
Son bras impose l’étendue de son règne.
Mais la gangrène du doute brandit sa laideur.
Enfin, la trépidante mouvance de l’Esprit,
Calquée sur l’empreinte centenaire des oracles,
Annonce l’histoire du Messie dans l’étable.
Réminiscence du mystère des âges.
Le flambeau éternel du monde à venir.
La délivrance campée sur le parvis des siècles.
La réponse à la quête millénaire de l’homme.
Finis les temps perdus à percer le silence des dieux.
A deviner les hiéroglyphes gribouillées dans les catacombes.
Il ne reste plus qu’à adorer la lumière promise.
Rêves d’éternité
Mes rêves plus somptueux que La Ferrière,
Mes murs habillés des demoiselles d’Avignon,
J’entrevois au loin mon nirvâna, le miel à venir.
Ai-je tout raté?
D’une décision à une autre, mon char s’égarant du parcours.
Les éclairs que je n’ai pu attraper,
Les fils d’araignée dont je n’ai pu me dépêtrer,
Est-il trop tard pour recommencer?
Capitaine de mon navire,
J’ai noyé mon Titanic.
La tête dans les nuages,
Je tenais le gouvernail.
Il a fallu que j’échoue,
Que mes châteaux s’écroulent,
Pour ramper jusqu’à Sa croix.
Il m’a fait rêver d’autres rêves,
Des rêves d’amour et de joie, des rêves d’éternité.
—Mario Malivert Extraits de De la Mort à la Vie, 2006
Poèmes de Guamacice Delice
Énigmatisme
tout homme jouit du privilège de mourir
blotti contre son cœur
sauf moi-même
mon cœur aura été éteint longtemps avant ma chute
du sommet du souffle
je songerai de l’attraper lorsque je périrai
mais il ne sera plus là pour moi
je n’aurai donc pas joui du privilège de m’appuyer
contre un battement
pour décoller de mon insularité caillée
étant donné qu’il s’agira de mon cœur
et en plus d’un mort de cœur
je ne veux pas qu’un œuf casse
ni alarme ni larmoiement
je veux des clappements
des éclats de dents
des cristaux de lèvres
je veux de la voix sèche sur fond de cliquetis
je veux que le temps jappe dans mon silence éteint
quand l’ombre brandira une clairière
qu’elle aura tiré de son intimité
pas d’ensevelissement dans des maux
mais dans le clabaudage d’un tambour
tambour !
tambour et tout son mystère
tambour et toute son énigme
tous ses grincements
tout son entêtement
tout son char d’air
toute sa contenance
toute sa turbe hurlante
mes derniers instants en tant qu’île
je les réclame sous les ailes de cet instrument fou
identité d’un monde au calme vert
couture du vivre ensemble sous les bambous
dans la profondeur des bois sur la cour
je veux lui confier un message à livrer
là où la mort n’atteindra jusqu’à sa mort
m’éviter l’hypocrisie des crises
la soudaineté des cris
la tradition des yeux mouillés
me confier au tambour puis vaquer à vos occupations
nous saurons nous entendre
avant le dernier clapotis du soleil
revenir me jeter un dernier livre de lumière dans l’âme
me couper du cauchemar d’écho vilain
rassembler les chiens du quartier
les confier mon cadavre
ils sont déjà payés pour me jeter dans la gueule du vide
Vent treize
ma terre drossée vers la fonte
par une vague de crises
mon arbre cambriolé
des épluchures de vent me pavent l’ombrage
dans un quotidien fatal
un slogan à quatre pattes
scandé par une foule de punaises
réclamant l’arrestation du pouce
pour violation des droits de piquer
ici enlisement naufrage
mouvance enneigement
une douille d’orage découverte
dans les reins du matin
chaque sens de la ville parsemé
de résidus de brises sèches sales et toxiques
le soleil a enfin décidé de relâcher le jour son otage
avant de se disperser dans un peloton de nuages
des interstices se mettent à japper
dans l’œil de la porte
c’est le vent qui passe pressé
avec un manteau de vide sur son bras
il part à la recherche d’une racine de verveine
le silence en geôle dans le coma depuis hier
engourdissement des pieds de la mer
poursuite du rétrécissement du rivage
les mornes roulent comme des billes
sur le glacis du temps
et les bois perdent toute raison d’espérer
Naufrage
ma terre drossée vers la fonte
par une vague de crises
mon arbre cambriolé
des épluchures de vent me pavent l’ombrage
dans un quotidien fatal
un slogan à quatre pattes
scandé par une foule de punaises
réclamant l’arrestation de la pouce
pour violation des droits de piquer
ici enlisement
naufrage
mouvance
enneigement
une douille d’orage découverte
dans les reins du matin
chacun des sens de la ville parsemé
de résidus de brises sèches sales et toxiques
le soleil a enfin décidé de relâcher le jour
qu’il avait pris en otage
avant de se disperser dans un peloton de nuage
des interstices se mettent à japper
dans l’œil de la porte
c’est le vent qui passe pressé
avec un manteau de vide sur son bras
il part à la recherche d’une racine de rave
le silence est tombé en coma depuis hier
la mer n’allonge toujours pas ses pieds
le rétrécissement du rivage continue
les mornes roulent comme des billes
sur le glacis du temps
et les bois perdent toute raison d’espérer
Pardon
Je ne me rappelle pas avoir demandé pardon
Pour avoir pris part à la lapidation de la première seconde
De ma naissance
Mousse d’un jour en crue
J’ai omis chaque fois d’élever la tête vers le sens
De chaque acte tombé dans la meute de cillements
Qui apprivoise l’aigle de mes nuisances
Pardon d’avoir cassé la tête du peloton de mon adolescence
Les intermittences de la perplexité
de mes bras et regards croisés
je m’interdis de m’excuser d’avoir raté
le scandale de Port-de-Paix
—Guamacice Delice
Poèmes d’Edner Saint-Amour
Science et poésie
Avec une âme poétique
avec un œil sociologique,
je demeure un meilleur témoin
de l’aujourd’hui et du demain
2
Science à l’objet le plus général
dans le domaine des relations sociales
la sociologie est la reine des sciences
qui accompagne mieux l’existence
3
La sociologie est toujours en mouvement
parce que dans l’espace et dans le temps
les relations naissent et disparaissent
du nouveau à l’ancien toujours sans cesse
4
Au palmarès de la médecine
de nouvelles relations se dessinent
dans la grande sphère de la science
nouvelles relations prennent naissance
7
Même dans le domaine du sexe
nouvelles relations s’indexent
Bref la société est un pilier d’éléments
toujours en motion, toujours en mouvement
8
Même la loi même le droit
où l’avocat règne en roi
est un fragment de ces éléments
qui se soumettent au changement
9
Même l’économie, la finance
où l’intérêt roule, se balance
demeure un de ces fragments
qui obéissent au mouvement
10
Tout sociologue doit s’armer de vigilance
sur l’objet toujours changeant de sa science
qui doit saisir la vie à travers sa motion
et saisir l’homme aussi dans sa tradition
11
La poésie est la reine de la beauté
dont la célébration sans cesse renouvelée
transposée en art, transposée en rime, en vers
réveille l’émotion dans un voile de mystère
12
Parce que l’homme est un qui bouge et qui rêve
tant au moment de la grève que celui de la trêve
la poésie reste plus près de l’être humain
qu’elle assiste au parcours de son destin
13
Pour avoir touché l’âme au fond du mystère
que recherche toujours l’homme de la terre
la poésie termine avec la vie le voyage
là où la science constate son point d’ancrage
14
La poésie quant à sa beauté
est un dévot fidèle de l’éternité
qui accompagne l’homme toujours
dans les jours de l’amertume et de l’amour
15
Faut pas mésestimer la poésie comme art
au point de vouloir le mettre au rancart
Dans le jeu incessant de l’existence
l’art de la poésie complète la science
16
Ce poème ne s’adresse pas aux âmes inciviles
qui sont toujours armées de leur projectile
pour amorcer une cynique compétition
dont l’intérêt est l’unique motivation
Nouvel Horizon
Amant de la connaissance scientifique
j’ai donné à la poésie romantique
un nouvel élan en y ouvrant un nouvel horizon
qui appelle l’âme à la réflexion
2
Je l’ai sortie de ses folles dérives
pour la conduire vers une nouvelle rive
où l’âme peut bien épouser l’émotion
ou se mettre au service de la réflexion
3
L’âme peut être reflet du cœur
en cherchant à travers sa splendeur
L’âme peut être reflet de l’esprit
avec réflexion comme marque du génie
4
Je l’ai cassée de sa note plaintive
pour la sortir de sa folle dérive
où le cœur a fait de la peine
un sentiment au statut de reine
5
Je dépose l’âme vers un nouvel horizon
là où le cœur parle de l’amour sans agitation
là où l’âme peut capter l’onde de l’esprit
à travers la réflexion comme marque de génie
6
Retenons que la poésie romantique
à travers toutes ses ballades lyriques
n’a pour modèle que la nature
et pour guide que la vérité, bien sûr
(19 juillet 2005)
Nouveau souffle
La poésie était couchée sur son lit
en attendant le rite de l’homélie
Tout était au point du dernier soupir
où l’on assiste à l’âme qui s’expire
2
Au métier consacré à la poésie
Tout était tintamarre et clapotis
qui choque l’esprit, l’oreille et la vue
qui s’écrit à l’encre de la déconvenue
3
Dans ce clapotis de la poésie
On ne s’amuse qu’à faire du bruit
Elles étaient les rimes de la poésie
dans profond état de léthargie
4
Je lève une tempête au fond de l’encrier
et tout s’aligne en ordre sur mon cahier
D’un coup j’ouvre nouvelle route
donnant à la poésie un nouveau souffle
5
Sur un front devenu plus serein
elle aspire à un meilleur lendemain
Les rimes qui vomissent de l’amertume
cèdent au sourire sous le bec de ma plume
6
Sans s’écarter du décor de sa beauté
la poésie s’écrit en toute liberté
une nouvelle manière de voir l’écriture
de transformer l’émotion en peinture
7
Laissons de côtés le tambour de la tristesse
qui nous enfonce dans la transe de la détresse
Laissons de côté la lyre de la mélancolie
qui nous fait vibrer au rythme de l’ennui
8
Cessons de nous ressourcer de la douleur
qui nous enfonce davantage dans le malheur
Au cœur qui frémit pensons à sa guérison
en explorant d’autres cieux, d’autres horizon
(décembre 2006)
Amour
Partout où l’homme passe sur la terre
il est accompagné de son inséparable colère
Pour un rien l’homme décharge la pile
il évacue les vapeurs de sa bile
2
Malgré notre colère au fil des jours
l’homme reste encore un être d’amour
qui manifeste un sentiment de tendresse
à l’endroit des gens qui sont en détresse
3
Quand on aime les gens de son alentour
la réciprocité décide qu’on est aimé en retour
Quand l’amour pousse au jardin de l’existence
l’homme vit sa vie dans les rive de l’espérance
4
Malgré nos peines, douleurs et nos soucis
on avance avec plus d’optimisme dans la vie
On défait voile ou pénombre de nos nuages
Lumière nous accompagne de tout son éclairage
Lumière nous accompagne la vie à chaque page
5
Un sourire à l’autre est un petit miracle
qui nous fait vivre des moments agréables
un sourire est quelque chose d’éphémère
mais renforce notre système immunitaire
6
Ainsi notre système de défense a tout ce qu’il faut
pour lutter contre les virus, les bactéries et leurs maux
Un sourire nous garde la vie en santé
Un sourire nous garde l’âme en gaieté
7
Un sourire nous garde l’être en tranquillité
Un sourire nous garde l’esprit dans la sérénité
Avec un sourire on voit la vie dans sa splendeur
à travers le versant agréable du bonheur
Rester positif
Sur le champ de la vie ou de l’existence
on peut se montrer combatif ou vaincu d’avance
Dans le cas d’une pathologie ou d’une maladie
cela démontre chez nous l’aptitude d’être guéri
2
Grâce à la détermination ou conviction profonde
on peut vaincre les maladies qui nous abondent
Le fait d’afficher une attitude de démission
peut compliquer le processus d’une guérison
3
Quand on se laisse emporté par la souffrance
en perdant tout espoir et toute confiance
On sombre dans les dérives de la fatalité
Il devient difficile de se remettre en santé
4
L’homme est un être de corps et d’esprit
il doit soigner en même temps les deux parties
Avoir une attitude positive devant la vie
nous rend plus combatif dans la maladie
5
L’homme doit constamment aspirer au bonheur
même quand il est livré aux mains de la douleur
On a besoin de notre puissante force mentale
pour résister aux assauts d’un malheur fatal
—Edner Saint-Amour
Poèmes de Tontongi
J’ai revu encore le campeur
J’ai revu encore le campeur
là dans le même coin du boulevard
avec la même posture d’égaré
le même regard de l’Au-delà
la même ironie dans les yeux
défiant l’esprit de sérieux
et le qu’en-dira-t-on
se moquant du réel
et aussi de la merde.
Il est toujours là
dans le même coin
la même mine d’inconnu
il est toujours là
vingt cinq années plus tard.
(15 octobre 2008)
L’Errant malheureux
Lui qui aurait aimé
qu’il explique sans parler
et comprenne sans entendre
lui vivant dans ses rêves d’antan
cherchant à coup de pleurs
et d’espoirs renouvelés
l’humanité dans l’homme
et des gens à aimer.
Lui l’Errant le salaud
qui aurait aimé vivre
vivre la vie sans le charme
dans l’amour dans la joie
trouver sous l’océan de froid
de mépris et de misère
un îlot de chaleur
qui propulsera l’amour.
(janvier 26, 1978)
L’incompris et la lueur éclatante
(dédié à Gillian)
L’ange dans son aura céleste
n’aura pas surpassé ta présence de ce jour
ce jour d’une force mortelle
où elle choisit de couper le nombril
de notre long dialogue d’incompris.
Tendre enfant aux charmes miraculeux!
J’envoie pour ta bonté
ta douceur enivrante
une gerbe de fleurs d’amour
un baiser de tendresse fraternelle.
(Oui dis-lui, cite-lui cet axiome des premières vérités que l’homme dans son orgueil a cru bon de piétiner. Dis-lui, si jamais elle l’oublie, que la vie ne vaut pas une larme de plus. Où avons-nous appris que nous devons toujours sacrifier nos épanchements naturels au profit des conventions douteuses? Où avons-nous appris que nous devons souffrir, haïr, nous brouiller et cacher, au lieu de vivre, de nous aimer, nous aider et être fiers de notre vérité humaine?)
Elle fut un jour pour moi pareille à une source
une source jaillissante d’amour virginal.
Elle fut un jour pour moi—ô défunte tendresse!
ma berceuse d’enfant que la vie m’a ravi.
Nous nous étions compris sans parler
vibrés et naturellement reflétés par un souffle secret
par un sentiment doux de passion inaudible.
Elle fut un jour moi peut-être un simple calcul!
(Et j’étais parti ce jour-là, livide, accablé du sentiment de l’évanescence de nos efforts, du néant de notre être, de l’impossibilité d’être nous-mêmes dans ce monde où tout se renferme, se vit et s’explique par une rationalité implacable.)
Dans les bois une nuit enlacés, épanouis
Gillian telle une lueur éclatante, caressante
luisait la nuit noire de mon cœur dépéri.
Elle savait par moments comme un jardin de printemps
secréter ces rosées d’une fraîcheur tressaillante.
Je sais que je mourais plus d’une fois dans ma vie:
Est-ce qu’une larme de plus renversera l’océan?
(Et je longeais la Commonwealth Avenue, tracassé par des sentiments terriblement contradictoires, certains me déprimant, me faisant réaliser la difficulté d’être; d’autres, adoucissants, me réconfortant dans l’espoir d’une humanité retrouvable. Il faut dire qu’entre la mère et la fille, entre la colère malheureuse, excédée, de ma pauvre douce amie et la compréhension sympathique de la fille, j’aimerais profondément en moi-même replacer toutes les deux, tous les trois, dans une intense et commune nirvâna de paix et de bonheur.)
Et je m’en allais regreté de mon amour coupable
enfermé solitaire dans mon drame existentiel.
Hé! Demande-lui pourquoi elle se sacrifie, elle
si explosive de vies pour des âmes ingrates,
pour des ingratitudes qui la survivront demain?
Demande-lui pourquoi ces pierres tombales,
pourquoi ces pleurs inutiles pour des destins jaloux
qui s’apprendront d’eux-mêmes?
Et je m’en allais en me disant: tant pis! Je montai dans le train et je pensai à Baudelaire quand il disait:
«Je t’adore à l’égal de la voûte céleste
Ô vase de tristesse, ô grande taciturne
Et je t’aime d’autant plus, belle, quand tu me fuis
(…) Je m’avance à l’attaque et je grimpe aux assauts
(…) Dis-moi, ton cœur parfois s’envole-t-il, Agathe?
La mer, la vaste mer console nos labeurs
(…) Comme vous êtes loin, paradis parfumé!»
(Boston, automne 1983)
L’Intrus
Je fus conçu à la manière de l’ortolan
Pour m’envoler de branche verte en branche sèche
Vers des lointains sans fond, égaré dans le temps;
Ma genèse fut saluée quand on brûlait une crèche.
Mon premier printemps a avorté sans sèvres,
Les figuiers, les cerisiers, les chrysanthèmes avaient fui
Par la vue de mon front de passionné en fièvre
L’horrible tragédie que présuppose ma vie.
Dieu a trahi l’espèce en m’incluant dans la liste
Des gens pour qui il a grande ambition;
Je n’ai jamais su suivre l’étho de sa bâtisse
Remplie de créatures nées pour la Rédemption.
Je fus maudit dès le départ. Et sans appel.
Le jour de ma naissance, un jour plein de soleil
Un orage éclatait brûlant même les cervelles
De tous les nouveaux-nés qui se crurent sans pareils.
Personne n’a jamais su qui je fus, qui je suis
On me croit l’Anti-Christ quand je parle de l’amour,
On me prend pour un saint quand je bombe Haïti;
Personne n’a jamais su si je suis nuit ou jour.
L’amour m’a toujours été un total inconnu,
Autrement dit quand j’aime je pleure et me passionne
La fille de ma vie change en un fruit défendu
Assurément créée pour une autre nature d’homme.
Je ne suis pas de l’espèce, je ne suis qu’un intrus
Dans une comédie que je n’ai pas choisie.
J’aurai fait mon possible pour habituer ma vue
À l’ambiance d’une vie qui ruine notre survie.
Mes «je t’aime» sonnent toujours pour horrifiées amantes
Comme un piège du chasseur pour mieux bafouer la proie,
Même mes efforts de plaire par des gestuelles galantes
Sont vus comme des astuces d’un trublion adroit.
En ce présent instant de ma vie de poète
Je ne sais pas encore ce qu’on attend de moi
Ni ce que je dois faire ne serait-ce que pour être
Pour montrer à mes frères et mes sœurs mon émoi.
Je ne veux pas mourir dans cet horrible vide
Qui désarçonne mes rêves et mes beaux enchantements;
Je veux trouver en vous comme dans un vent torride
Le sens du destin qui recrée le firmament.
Nota bene: Ce poème du désespoir existentiel peut être aussi lu comme à la fois un refus du vide d’être et un appel pour dépasser les limites imposés à la vie. S’il reconnaît, en vivant leur contingence, que les sentiments comme l’amitié, l’amour et la peur sont dans l’ordre du vécu, le poème entend questionner leur contextualité, pour leur opposer un horizon riche d’émerveillements et de découverte de l’Être. C’est en somme un poème du sentiment dans la totalité des états de celui-ci.
—Tontongi
Poème de Ernest Pépin
Pays levé, pays lavé
Voilà mon pays qui se lève.
Avec le poing lumineux du soleil
Il a mis aux pieds des sandales de justice
Et sa voix a claironné la vérité des temps
Les oreilles se sont ouvertes
Les yeux ont vu la parole nourricière
Il chante péyi la sé tan nou
Et les feuilles répondent en chœur
Au chant de sa rosée
Les hommes et les femmes marchent d’un pas égal
Chantent d’une voix égale
Les tambours ont traversé la rue
Ils portent le beau temps sur leurs épaules
Ils éclairent la vie malgré la souffrance des ombres
Les jeunes sont venus déterrer leurs rêves
Pays levé
Pays lavé
En marche vers la tendresse des lendemains
En révolte contre les profitations
Entre colère et amour
Ouvrant ses racines comme une main nouvelle
Réconcilié avec son cri
Et sa récolte d’étoiles
Sorti de la torpeur des mangroves
De l’immobilité des statues impuissantes
Mon pays s’est levé d’un seul coup
D’un seul souffle de tornade interdite
D’une seule houle de mémoire mûrissante
Pays levé
Pays lavé
Et il a dit assez
Laissez passer la Guadeloupe!
(Le 2 février 200
—Ernest Pépin
Poème de Jean-Dany Joachim
Judas Iscariot
Je suis le père du fils
qui doit livrer le fils de Dieu
L’éternité louera la mort
du fils créateur, et son
nom sera sanctifié,
il sera ressuscité
Et moi je pleurerai dans l’ombre
le sacrifice du mien
Ainsi le veut la prophétie
à jamais on dira son nom avec dédain
Et pour le salut de l’humanité, et
la plus grande gloire de Dieu
Je pleurs mon sacrifié
dans l’ombre d’un arbre.