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Poèmes en français

Poèmes de Nounous

Semelles d’ailleurs

“Femme enceinte” acrylic on canvas, by Jean-Yves Metelus, in Haitian Art in the Diaspora

Femme enceinte, acrylic sur toile, par Jean-Yves Metelus, in Haitian Art in the Diaspora, vieartcollection@aol.com

Tu m’habillais de vent sous les étoiles
dans les hauteurs
une douce flamme entre tes dents
quelque part dans la ville
au beau milieu des premières gouttes du beau
à l’intérieur des tiges de l’équinoxe
il y a de cela une éternité ou deux
dans les allées du meilleur au tout autre
lorsque nous venions de naître tous les deux
plus joyeux que sûrs pour tout dire côte à côte
mais aussi bien que quiconque il est vrai
en ce genre d’accouchement entre les sentes du temps
qui va et qui rebondit on le sait de tout temps comme il veut.

Mais regarde-toi le dos aujourd’hui
vois à l’instant si tu n’entends pas
les plis de mes chants gris qui miaulent
dans son sillage si mouvant sous silence
dis-moi comment fais-tu pour que la dureté maintenant
soit si féroce dans tes anciennes mains d’allégresse
autrefois si tant que tu fourbissais dans les miennes
et surtout comment fais-tu
oui dis-moi comment fais-tu
pour que l’absence soit si lourde de tes semelles d’ailleurs
sur ma gorge d’ici aux heures les jours
sans le moindre mouvement du mouchoir à ta gauche
vers ce même point en direction de mes saules sur la rive.

Un tout simple clin d’œil

Pour toute nourriture
cette fois
j’ai cru avoir eu une eau de pâques
que j’espérais lumineuse
puis l’amour frais de partir
et de rester avec elle en voyage
pour toujours comme on dit
bien au courant que cela exprime obscurément bien moins
ou parfois bien plus que ce qui s’énonce
en fait au clair entre les lignes.

Maintenant j’ai ces quelques miettes d’une pluie
qui n’est pas sûre de vouloir s’abandonner dans ma terre
pour la repousse à belles gousses
tandis que les correspondances dans leur division
sont plus sourdes de plus en plus au loin
à mesure que certaines petites douceurs d’autrefois
tranquillement s’animent dans parfois la difficile voie du passé
où les autres se tiennent gravement avec leurs certitudes implacables
et les unes avec le contraire ou leur façon de faire accroire
que mes notes n’ont jamais ressemblé à leur vrai visage dans la flûte.

Mais après avoir su le lourd à soulever
pour savourer les produits d’aucuns raisins de la griserie
en provenance de certaines terres à ma portée
j’ai peur ô mon corps de ta soif pour le grand cru!
Est-ce un tout simple clin d’œil à Alexandrine ici
cette belle d’ailleurs aux allures beaucoup trop d’hier
en ma vue d’aujourd’hui
ou tout bonnement le lieu de dire l’étendue d’une surfaite insatisfaction?

Toujours en porte-à-faux

Au bal des mal-aimés
petite fille de jadis
toujours en porte-à-faux avec eux tous
et puis tous ceux qui essaient d’effacer par l’absurde
le tout pour un tout autre à ton insu
sans devoir rien laisser paraître de tes tribulations
ni même de la brûlure versée sur ton visage au tréfonds
tu danses encore sans faille malgré tout
au pas que tu laisses dans les nôtres traîner
par tes dires ou tes désirs d’élévation
après avoir chaussé les longs cris du feu autrefois
dans tes yeux après la pluie du fouet
à outrance sur ta couverture de nuit indélébile.

Au bal des mal-aimés
quelque peu nous tous aujourd’hui encore
toujours en porte-à-faux avec eux tous
et puis tous ceux qui essaient d’effacer
ce tout pour un tout autre à leur convenance
au lieu d’avoir à réparer les ponts cassés qui nous cachent certains horizons
tout près des aveugleurs maintenant
des calculateurs ou même des méprisants
sans une seule crainte devant l’insoutenable dans la danse
avec des signes en pile dans nos mains
aussi d’immenses vignes dans la vue
nous défaisons tout un ensemble de plis dans la voix
jurant de ne rien oblitérer du message de tes yeux dans nos regards.

Hormis pourtant nos cavaliers

Tu as fait de nous un vieux chemin
où déposer tes pas perdus
quand l’amertume te court après
car tu sais bien nous retrouver
à l’occasion nous parcourir ou même nous déserter
quand tout cela fait tout ton beurre
par le fait que tu nous sais sensibles à ces sortes de passage
et combien muets ou indifférents par moment
en présence de ces incontournables détours
sous les tonitruants galops de tous ces souvenirs
qui se font grelots à tout instant autour de toi
au cou des bêtes de ton pâturage
hormis pourtant nos cavaliers en fin de compte.

Brise qui se fait miroir

J’appartiens à cette lignée de vents contraires aux bourrasques
je suis la brise qui se fait miroir
à la face même du roseau le plus frêle m’appartenant
malgré temps et marées pas bien propices
pour la quête de certaines choses
afin qu’il se voie se battre
et résoudre l’énigme du déracinement
dans de nouvelles traversées au fil de la mémoire
pour enfin plus ou moins saisir en tout sens
la portée de chaque cillement vers le dépassement
dans les regards et l’opportune vision du cœur d’autrui.

Aux abords des vents

Ne me parle plus de cette saison-là
à l’intérieur de nos petits bateaux par l’image
car il y a d’autres voiles à inventer dès l’aurore
tant d’espoirs à fabriquer pour nos yeux
qui se dégradent sous la pluie des malentendus
aussi des villes nouvelles sans scandale à ouvrir
aux abords des vents sans fracas qui bougent
comme ils veulent au beau fixe
en pourchassant tous les fantômes qui nous heurtent
pour réanimation vers l’intime chaleur des voyages
et découverte de la soie en nous du bonheur enfin.

Arpège dans la nuit

Il n’y a eu
musique ma muse
de bonne heure en vitesse
que les allées à perte de vue du néant
à perte de vue toutes ces allées
qui laissaient présager tant de possibles retours
sans rien livrer ou presque d’harmonieux
par la suite à ton écoute au fil des notes.

Ainsi tout n’est que signes
mésintelligence et autres venant de tes non-dits
que je dois à tout coup déchiffrer
pour dans le doute contourner les travers
sans possibilité même un peu de m’abstenir
ce qui me force à supposer vraiment
crois-moi si tu le peux
qu’en ces tons-là tu n’es pas mieux que mon dernier chant gris

D’emblée

Tes chevaux dans le lac en fuite
mes mains sur leur crinière dans l’air
soudain
tout un ensemble de mûres se dessinent
dans mes yeux sans sommeil
en quête d’un renouvellement de ta peau-confiture
au centre de ma parole en son essentielle configuration.

—Nounous

Poème de Guamacice Délice

un printemps en panne de conscience

un essaim de poux de bois
bâtit une citadelle
dans un bout de bambou
canne de madère
dans la rivière de mon île blanche
une anguille dans les fourchons
d’une fourchette antique
un têtard pris dans le gros
intestin d’une nasse

l’ouragan rouge emporte ma virginité
opaque l’astre du marron pâture dans le globe
oculaire d’une frégate
où deux frimas s’accouplent
cime de la vue d’une colline en pique
une natte en vent libre
tressée en paille de peur

un pont en toile d’araignées
sur l’oxygène de ma jeunesse
entre les amygdales
de mon homme d’éventail
mes tiges de rêve s’élèvent en branchettes de
cauchemars
trente deux abcès
me tiraillent les mâchoires
de poète au verbe engourdi
ma langue glacière
je suis un printemps en panne de conscience.

—Guamacice Délice

Poème de Huguens Louis-Pierre

L’imaginaire

Fantastique irréel
Imaginaire merveilleux
Mythe des pensées puériles
Artifice du goût profane
Mes rêves s’embarquent à bord de l’évasion.
Illusion-illusoire
Hallucination-mirage
Je suis un paralytique rêvant qu’il marche,
Un manchot au bras de fer,
Un aveugle aux yeux perçants, l’œil du maître.

Je suis un vieillard réinventé au jour de sa naissance,
Encore nourrisson, mais au déclin des ans.
Rêves aux cheveux dorés
Voyageur égaré
L’imaginaire assiégé d’espoir
Mon château de cristal apparent:
Pure hallucination.
La vérité chante une note illusoire
Et le mensonge parle le langage du mythe.
L’esclave devient maître
La prostituée étale sa bague d’alliance.
Et moi je bois la coupe des sept merveilles du monde.
Plutôt huit:
Et la Citadelle La Ferrière?
Au monde imaginaire,
Quoi donc sonne le plus vrai?

—Huguens Louis-Pierre

Poème de Vilvalex Calice

Le dernier mot

Le vieux sorcier est mort, il ne reviendra plus
pour habiter le vide où nos beaux rêves ont fui,
pour chevaucher des pas entravés de remords
dans le remous des âmes et la laideur des corps

Le vieux soldat est mort, nul a jeté de pleurs
quand la terre comme un ciel rejette ses couleurs
c’est la tuerie des hommes qui lance le défi,
à la vie, à l’espoir, en nous laissant meurtris

Quand les mains et les cœurs renoncent á la touche
les fausses couches se font malgré mille retouches
tout un peuple va mourir dans un grand lit vêtu
de promesses sombres jusqu’ici inconnues

Haïti n’est pas morte, dis-je à ceux qui l’enterrent
de leurs poignes sanglantes elle saura se refaire
du cendre des haillons de nôtre défaite brève
renaîtront à coups sûrs tes plus beaux jours de rêve.

—Vilvalex Calice

Poèmes d’Edner Saint-Amour

Éternité du poète

ÉTERNITÉ DU POÈTE
Hélas! Le soldat se prépare à la guerre
Mais rien n’assure sa destinée
vers l’horizon de l’éternité.

Le Prof touche au pic de son ambition
le portant à cultiver des générations
mais ne consacre pas sa renommée
dans la sphère de l’éternité.

Le prêtre a beaucoup de fidèles
ÉTERNITÉ DU POÈTE
Les barbares envahissent la frontière
auxquels il prêche parole de l’éternel,
mais ne détient pas toujours la clé
qui ouvre la porte de l’éternité.

Seul le poète dont l’imagination
tourne comme la roue de la création
sait tisser le bouquet de la renommée
qui rejoint les rives de l’éternité.

Ô poète, vous dont le nom est éternel
et que Dieu toujours vous appelle
brassez, brassez à jamais les rimes
vous gravirez la poésie jusqu’à la cime

(6 juillet 2003)

L’homme

Dans son cœur d’ombres suprêmes
Hélas! se réunissent deux extrêmes
Dont le contenu reste à l’esprit
Un mystère d’un secret infini.

Tantôt doux comme un agneau
Tantôt fort comme un taureau,
C’est ainsi qu’il va son chemin
En suivant le rythme de son destin.

Homme! quelle langue étrange!
Aussi doux qu’un saint ange,
Il suce le sein de la femme
Qui tranquillise son âme

Homme! quelle main de bourreau!
Aussi inclément qu’un héros,
Tout lui est motif de la guerre
Surtout au jour de sa colère.

Si élevé son degré de flamme
Homme a pour opium la femme
Dont les seins lui couvrent de tendresse
Le noyant dans un océan d’ivresse.

(3 juillet 2003)

—Edner Saint-Amour

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